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Les chansons frondeuses - fin
 6) Il tamburo della banda d’Affori                    Le tambour de la fanfare d’Affori (Testo  : Mario Panzeri (1911-1991) e Nino Rastelli (1913-1962) Musica  : Nino Ravasini (1900-1980)  1941) Arriva la banda arriva la banda arriva la banda    La fanfare arrive la fanfare arrive la fanfare arrive coi suonator, coi suonator (coi suonator)    avec ses instrumentistes, avec ses instrumentistes Oh Caterina, Caterina che batticuor    Oh Catherine, Catherine quel battement de cœur) (Oh Caterina, Caterina che batticuor).    (Oh Catherine, Catherine quel battement de cœur). Il capobanda, il capobanda, il capobanda          Le chef d’orchestre, le chef d’orchestre, ha i bottoni d'or, sorride ognor (che rubacuor !)          a des boutons d’or, il sourit toujours (quel séducteur  !) Oh Caterina, il capobanda è il tuo grande amor  Oh Catherine, le chef d’orchestre et ton grand amour (Oh Caterina, il capobanda è il tuo grande amor).  (Oh Catherine, le chef d’orchestre et ton grand amour). Eccoli qua son tutti qua            Les voici là ils sont tous là Sol la sol mi, do re mi fa            Sol la sol mi, do ré mi fa E coi bastoni a penzolon                   et avec ses bâtons qui pendent Giunge il tamburo come un tuon.    arrive le tambour comme un tonnerre. È lui (è lui), è lui (è lui), sì sì è proprio lui           C’est lui (c’est lui), c’est lui, oui oui c’est vraiment lui È il tamburo principal della Banda d'Affori           c’est le tambour principal de la Fanfare d’Affori Che comanda cinquecentocinquanta pifferi   qui commande cinq cent cinquante fifres. Che passion, che emozion quando fa bum bum   Quelle passion, quelle émotion quand il fait boum boum Guarda qua, mentre va le oche fan qua qua   Regarde là, tandis que les oies font coin coin Le ragazze nel vederlo diventan timide           les filles en le voyant deviennent timides Lui confonde il Trovator con la Semiramide           Lui, il confond le Trouvère av ec Sémiramis Bella figlia dell'amor                   Belle fille de l’amour Schiavo son, schiavo son dei vezzi tuoi !           je suis esclave, je suis esclave de tes charmes  ! Passa la banda, passa la banda, passa la banda,     La fanfare passe, la fanfare passe poi va a Cantù (poi va a Cantù)                    puis elle va à Cantù (puis elle va à Cantù) Oh Caterina ma il tuo amor non va avanti più            Oh Catherine mais ton amour ne progresse plus (Oh Caterina ma il tuo amor non va avanti più).    (Oh Catherine mais ton amour ne progresse plus) Forza Luigi, forza Luigi, forza Luigi           Allez Louis, allez Louis, allez Louis che c'è il tranvai,                          car il y a le tramway che c'è il tranvai (che c'è il tranvai)           car il y a le tramway (car il y a le tramway) Lui con un piede nel binario sta in mezzo ai guai    Lui avec un pied dans les rails est dans le pétrin (Lui con un piede nel binario sta in mezzo ai guai).     (Lui avec un pied dans les rails est dans le pétrin). Fermate il tram, spostate il tram  Arrêtez le tram, déplacez le tram Scendono tutti che baccan    Ils descendent tous quel tapage E lui con calma e serietà  Et lui avec calme et sérieux Cerca la banda dove sta.  Cherche la Fanfare où elle est. . . . . . . . È il tamburo principal della Banda d'Affori          C’est le tambour principal de la Fanfare d’Affori Che comanda cinquecentocinquanta pifferi  qui commande cinq cent cinquante fifres Che passion, che emozion quando fa bum bum  Quelle passion, quelle émotion quand il fait boum boum Guarda qua, mentre va le oche fan qua qua  Regarde là, tandis que les oies font coin coin Le ragazze nel vederlo diventan timide          les filles en le voyant deviennent timides Lui confonde il Trovator con la Semiramide          Lui, il confond le Trouvère et Sémiramis Bella figlia dell'amor                 Belle fille de l’amour Schiavo son,  schiavo son dei vezzi tuoi !         Je suis esclave, je suis esclave de tes charmes  ! Affori était une commune autonome près de Milan, absorbée par  la ville en 1923. Son nom vient probablement du latin «  Ad forum  », qui pourrait indiquer qu’il y avait ici un marché  ; d’autres la font provenir de «  ad fontem  », qui indiquerait la présence d’une fontaine et d’une abondante source d’eau. Son nom a été rendu célèbre par la chanson qui faisait allusion à l’ensemble musical Gaetano Donizetti, fondé en 1853, connu sous le nom de «  Banda d’Affori  », qui interpréta en premier et en dialecte milanais la chanson de  Panzeri et Rastelli  ; et rappelons qu’en dialecte milanais «  piffero  » signifiait «  stupide, imbécile  ». Évidemment la censure fasciste recommença à convoquer Panzeri  : les 550 «  fifres  » ne pouvaient être qu’une allusion critique à la Chambre des Fasci e Corporazioni qui comprenait 550 membres, et le «  tambour  » ne pouvait donc être que Mussolini lui-même. Du coup, les antifascistes s’emparèrent de la chanson. 7) PAPAVERI  E PAPERE  (Testo  : Nino Rastelli-Mario Panzeri Musica  : Vittorio Mascheroní (1895-1972) 1952) Su un campo di grano, che dirvi non so, Sur un champ de blé, je ne saurais dire où un dì Paperina col babbo passò un jour avec son père une petite oie passa e vide degli alti papaveri al sole brillar et vit de grands coquelicots briller au soleil e lì s'incantò.                Et elle en fut ravie. La papera al papero disse  : « Papà, La petite oie dit à l’oie  : «  Papa pappare i papaveri come si fa ? ». Comment on fait pour croquer les coquelicots  ?  » « Non puoi tu pappare i papaveri », disse papà. «  Tu ne peux pas croquer les coquelicots  », dit le papa E aggiunse poi beccando l'insalata : Et il ajouta ensuite en picorant la salade             « Che cosa ci vuoi far, così è la vita ». «  Que veux-tu y faire, c’est la vie  ». « Lo sai che i Papaveri son alti, alti, alti,                «  Tu  le sais que les coquelicots sont très très hauts,  e tu sei piccolina... e tu sei piccolina ... »                    et que tu es toute petite… tu es toute petite…  » « Lo sai che i Papaveri son alti, alti, alti,                «  Tu  le sais que les coquelicots sont très très hauts, ... sei nata paperina, che cosa ci vuoi far ? »      … tu es née petite oie, qu’est-ce que tu veux y faire  ?  » Vicino a un ruscello, che dirvi non so, À côté d’un ruisseau, je ne saurais vous dire où un giorno un papavero in acqua guardò, un jour un coquelicot regarda dans l’eau, vide una piccola papera bionda giocar il vit jouer une petite oie blonde e lì s'incantò....        et il en fut ravi … Papavero disse alla mamma : « Mammà, Le coquelicot dit à sa maman  : «  Maman Pigliare una papera come si fa  ? ». Comment on fait pour attraper une petite oie  ?  » « Non puoi tu pigliare una papera » disse mammà.         «  Tu ne peux pas attraper une petite oie  », dit la maman.  « Se tu da lei ti lasci impaperare,                        «  Si tu te laisses embobiner, il mondo intero non potrà più dire :                        le monde entier ne pourra plus dire  :   « Lo sai che i Papaveri ecc.  ».                        «  Tu  le sais que les coquelicots, etc.  ». E un giorno di maggio, che dirvi non so,  Et un jour de mai, je ne saurais dire quand, avvenne poi quello che ognuno pensò :  il arriva  ce à quoi chacun pensait  : Papavero attese la papera al chiaro lunar le coquelicot attendit la petite oie au clair de lune e poi la sposò.         Et il l’épousa. Ma questo romanzo ben poco durò Mais ce roman dura bien peu ... Poi venne la falce che il grano tagliò. … Vint ensuite la faux qui coupa le blé … E un colpo di vento i papaveri in alto portò. … et un coup de vent emporta en l’air les coquelicots.  ... Così Papaverino  se n'è andato         … Ainsi le coquelicot s’en est allé lasciando Paperina impaperata.         Laissant la petite oie embobinée. Morale :                        Morale  :  « Lo sai che i papaveri son alti, alti, alti... ecc. ecc. «  Tu  le sais que les coquelicots, etc.  ». (Ripete coro).                 (Le chœur reprend) La chanson eut une diffusion énorme en Italie (70.000 exemplaires) et à l’étranger, de l’Angleterre (plus de 600.000 exemplaires) à la Chine  ; le succès fut accru par les reprises par Bing Crosby, Yves Montand , Beniamino Gigli, et par le film de Marcello Marchesi, Lo sai che i papaveri, avec Walter Chiari, Franca Rame, Raimondo Vianello, Dorian Gray, où la chanson était chantée par Nilla Pizzi et Gino Latilla. Elle avait été présentée à Sanremo en 1952 par Nilla Pizzi, qui avait gagné la première édition de 1951, et cela provoqua un tel trouble qu’une séance du Parlement italien évoqua la chanson. Le langage est au départ ambigu  : il «  papavero  » est à la fois le pavot ou le coquelicot et une personne ennuyeuse parce qu’importante  ; la «  paperina  » est à la fois une petite oie et une femme stupide ou une oie blanche (Voir l’article sur la traduction de la chanson, Quel pivot pour la traduction de Amr Helmy Ibrahim, sur le site Internet  : e-crit3224.univ-fcomte.fr/download/3224- ecrit/document/numero_4/8_ibrahim-tpdon-quel-pivot-pour-la-traduction---69-78.pdf). Cette chanson surréaliste racontant les amours d’un coquelicot et d’une petite oie a donc en réalité une portée politique, et l’auteur, Mario Panzeri, l’avait reconnu  : «  Le texte de Papaveri et papere m’a été suggéré par la prosopopée (NDR. la parole est donnée à un personnage fictif) de certains personnages politiques. Je crois que même avec une simple chansonnette on peut faire un satire des mœurs  ». Désormais, la censure fasciste avait disparu, et la censure démocrate chrétienne était moins rigoureuse quand on ne parlait pas de sexualité et quand on n’attaquait pas la famille. Cela laisse penser que c’est bien par crainte de la censure fasciste que Panzeri défendit autrefois son «  innocence  » pour les chansons précédentes. Dans la chanson, on peut considérer que les coquelicots sont les communistes (ils sont «  rouges  »), que le vent de l’histoire va bientôt détruire et emporter dans les airs. Et en effet, la Démocratie Chrétienne utilisa le slogan dans une de ses campagnes électorales suivantes  ; et on y vit évidemment une allusion au leader DC Amintore Fanfani, qui était petit comme la «  paperina  », mais très puissant dans son parti et dans le pays. Mais à l’inverse le Parti Communiste italien (PCI) utilisa la chanson pour montrer que le vent de la révolution allait balayer les puissants « papaveri  » de la Démocratie Chrétienne, tandis que la «  paperina impaperata  » était le peuple trompé et écrasé, laissé sans possibilité de véritable choix par les puissants de la DC. Gianni Borgna interprète la chanson comme affirmation d’une  morale ultraconservatrice, «  de renoncement délibéré, qui prêche la résignation à outrance et l’acceptation passive («  supina  ») de son propre état d’infériorité sociale  ». Il ajoute que, bien sûr, l’infériorité est aussi celle de la femme, mutilée et subalterne, nouvelle affirmation de la supériorité masculine (Storia della canzone italiana, Laterza  , 1985, p. 136). Reste que c’étaient les «  forchettoni  »   (les «  requins  ») de la DC, comme on les appelait souvent, qui étaient annihilés et emportés par le vent (au Paradis  ?...). Alors, on peut choisir …  ? C’est l’ambiguïté de la chanson : FAIRE RIRE AUX DÉPENS DES INDIVIDUS SANS CRITIQUER LE RÉGIME. Que conclure  ?               1) Importance de la musique  : Ce que redoutent beaucoup les censeurs fascistes, c’est d’abord la musique inspirée du jazz, ils savent l’importance de la musique sur l’esprit des gens du peuple, et ils ont les plus grandes difficultés à la censurer réellement. Ils étaient de ceux qui avaient bien enregistré l’importance de la chanson dans une société de masse qu’il faut de plus en plus conditionner psychologiquement et affectivement plutôt que faire réfléchir. 2) Un homme plus qu’un régime  : Une tendance a été accentuée par le fascisme, adorer ou critiquer un homme plus qu’un régime. La majorité des Italiens ont été mussoliniens plus que «  fascistes  », il aiment le pape plus que l’Église Catholique, ils adorent Padre Pio, ils sont «  renziens  » (partisans de Matteo Renzi) plus que «  Démocrates  » (partisans du PD, Parti Démocrate, dont Renzi est le patron), ils ont suivi Silvio Berlusconi, plus qu’ils n’ont aimé Forza Italia), ils étaient à la limite de faire une révolution quand Togliatti a été victime d’un attentat plus qu’ils n’étaient «  communistes  », etc. Dans ces chansons, ce qui est critiqué, ce n’est jamais un régime politique, mais ce sont les défauts physiques, les manies, la façon de s’habiller d’un individu  ; la plus «  politique  » de toutes serait en ce sens Papaveri e papere. On procède toujours par jeux de mots, emploi de mots à double sens, allusions, assonances ou rimes qui divertissent l’oreille, mais on ne critique jamais de façon claire et explicite. 3) Une forte ambiguïté politique  : La conséquence est une totale ambiguïté de la critique. Panzeri et Kramer furent-ils antifascistes  ? Difficile à dire. Ils furent surveillés et réprimandés par la censure fasciste, mais jamais arrêtés ni condamnés. Leurs chansons n’appelaient pas à une lutte contre le fascisme ou contre le pouvoir (de la DC  ? du PCI  ?), mais visaient à faire rire de tel ou tel côté grotesque, de telle ou telle impossibilité pratique (un coquelicot ne pourra jamais épouser une petite oie  !). C’est le constat d’un aspect de la réalité  : Mussolini est chauve (ce n’est pas très conforme à l’idéal de virilité raciale qu’il décrivait dans ses discours, alors rions un peu de lui, mais sans le combattre vraient), Starace est ridicule dans la façon dont il s’habille, les membres de la nouvelle Chambre sont des «  fifres  », c’est-à-dire des «  crétins  » soumis à leur «  tambour  », on rit de la mort de l’Amiral Ciano  ; les femmes (les oies) sont inférieures aux  hommes (les coquelicots), mais ceux-ci seront emportés par le vent, alors pourquoi lutter au risque de sa vie  ? Attendons le vent  ! Et c’est peut-être la chose que l’on revendique le plus fortement  : garder le droit de rire de tout, même du pouvoir dominant, que par ailleurs on n’appelle nullement à combattre. On est là à l’opposé de ce qu’on a appelé «  chanson de lutte  », mais aussi de ce qu’ont voulu faire les plus grands des «  cantautori  », et les Italiens, dans leur majorité, se sont révélés prêts à accepter la dictature fasciste, au prix de quelques soulagements par le rire que provoquait la chanson, de quelques plaisanteries et beaux discours des «  chefs  », faisant preuve d’une sorte de paresse mentale, d’indolence  et de légèreté sur lesquelles pouvait fleurir l’oppression du régime  ; ils sont sensibles à la rhétorique formelle et à la capacité de raconter des histoires drôles  : c’est ce qui a fait le succès de Berlusconi  ! Et ce qui fait actuellement celui de Renzi  ! Jugement à  réfléchir (et à critiquer bien sûr  !, n’hésitez pas et écrivez).
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