4.3. L’histoire des villes italiennes : Milano - 1 / 8
1 – Milan celte, romaine et ambrosienne Milan (mediolanum) est-elle née romaine ? … Non, elle exista avant Rome, son site est occupé par les Celtes Ligures dès l’âge de bronze (3000 – 1000 av. J.C. : les tombeaux de la Cattabrega, près de Crescenzago,), car elle est au centre d’une région fertile de plaine ; puis arrivèrent à l’Âge de Fer (1000 – 500 av.J.C. : tombeaux près de Milan) des groupes d’Ombriens et de Vénètes, et elle devient la capitale des Gaulois Insubriens, entre le Ve et le IVe siècle av. J.C., venus de Gaule et appelés « gaulois » par les Romains, avec leurs cousins Boi, Sénons et Lingons bien connus des Grecs et des Étrusques. Ils fondèrent la ville sous la conduite de leur chef légendaire Belloveso vers l’an 400 av. J.C., avec le nom celtique de Mitt-land latinisé en Mediolanum = au milieu de la plaine (cf. d’autres villes gauloises au nom d’origine celtique, Moiliens Meuliens, Miolan). Une légende voulait que Belloveso ait trouvé une truie à demi couverte de latine (in medio lanae) qui resta symbole de Milan jusqu’au IVe siècle. D’autres hypothèses expliquent la naissance de Milan par la commodité de son site à la confluence de deux fleuves, qui en favorisait la défense. Le centre de la ville aurait été piazza Duomo où, selon Polybe, les Celtes auraient adoré une divinité, Belisama, équivalent d’Athéna ou de Minerve. Pour renforcer leur présence, ils luttèrent contre les Taurini et contre les Étrusques, dont ils détruisirent la ville de Melpo en 396 av. J.C. Les Romains commençaient alors leur remontée vers le Nord, ils furent vaincus par les Gaulois dirigés en 390 par Brennus qui ravagea Rome. Mais le consul Furius Camillus les vainquit en 367 av. J.C. près d’Alba, et la frontière fut repoussée à la plaine du Pô à partir de 235 av. J.C. Les Romains conquirent Mediolanum en 222 av. J.C., et toute la région avec la conquête de Côme. Les Insubriens et les Boi profitèrent de la descente d’Hannibal en 218 av. J.C. pour s’allier aux Carthaginois et reprendre Crémone, et ils ne furent définitivement soumis à Rome qu’à partir de la défaite d’Hannibal à Zama en 202 av. J.C. ; Milan fut reprise en 196 av. J.C. et se transforma en castrum romain (ville fortifiée), avec un ensemble de murailles de plus de 3 kms en pierres et briques, dont il ne reste que 32 m. rue San Vito ; elle avait 4 portes, dont la porte Ticinese, sur la route de Pavie, conserve une tour au Carrobbio ; on a encore la trace de rues orthogonales au Forum, et des dalles de pavement en pierre de Vérone sous la basilique Ambrosienne ; le Musée archéologique conserve 2 colonnes toscanes et un chapiteau ionien « en corne de bélier », qui suggèrent un temple et un portique, que Virgile connut sans doute quand il vint étudier la rhétorique à Milan en 54-53 av. J.C. Peut-être connut-il aussi le Théâtre dont les fondations se trouvent sous la Chambre de Commerce. La véritable intégration dans la romanité se fit avec Jules César qui, entre 58 et 51 av. J.C. créa dans la région les bases logistiques nécessaires à la conquête de la Gaule. C’est là, selon l’anecdote, qu’il découvre le beurre gaulois, alors qu’il ne connaissait que l’huile latine ! L’aire du castrum s’étendait environ sur 50 hectares, en forme de carré approximatif avec des côtés de 700 mètres (Cf. la structure de la Turin romaine), dont un angle est encore reconnaissable dans le tracé des rues Cornaggia et Disciplini (frontière méridionale des murailles). Le Forum se trouvait vers la place San Sepolcro, et on en trouve des traces dans les souterrains de la basilique Ambrosienne où se croisaient le cardus maximus et le decumanus maximus, au bout desquels s’ouvraient les 4 portes, la Romana (vers via Maddalena et piazza Missori), la Ticinensis (au Carrobbio), la Vercellina (croisement via Brisa et via Santa Maria alla Porta) et la Nova (place de la Scala). Après la conquête de la Gaule, César fait attribuer aux villes de la Gaule Transalpine le titre de Municipium civium romanorum qui les dotait d’un gouvernement municipal autonome, avec le droit d’élire leurs propres magistrats. Sous Octave Auguste, Milan devint chef-lieu de la XIe région d’Italie. En 48 après J.C., l’empereur Claude accorda la citoyenneté romaine à toute la Gaule transalpine, et Milan devint Colonie impériale, au cœur du système administratif et commercial romain, dans toute la vallée du Pô, puis du système militaire à partir du moment où il fallut combattre les premières invasions « barbares » venues du Nord. À la fin du IIIe siècle, l’empereur Dioclétien divise l’empire en deux parties, et fait de Milan la capitale de la partie occidentale avec Marcus Aurelius Valerius Maximien pour empereur (286- 305). Milan devient donc une capitale d’empire, en concurrence avec Rome, et elle reçoit la cour, l’armée, le gouvernement et tout ce qui est nécessaire à leur fonctionnement et à leur gloire, constructions, approvisionnement, ameublement, arts somptuaires. Maximien, qui avait pris le titre de Herculius, fit construire un second  cercle de murs de 4,5 kms de long, entouré de fossés ; une des tours subsiste près du Corso Magenta (Cf. photo ci-dessus, dans le jardin du Musée archéologique) : il y fit ajouter 4 nouvelles portes, la Comacina (Via dell’Orso / Ponte Vetero), la Jovia (Vie San Giovanni sul Muro / Puccini), l’Argentea  (piazza San Babila) et l’Herculea (Vie Cavallotti / Durini) Il embellit la ville de monuments comme les Thermes Herculéens (maintenant sous le Corso Europa) où on a retrouvé le torse d’une statue d’Hercule, copie de l’Hercule Farnese du Musée de Naples, et un grand Cirque (450 m. par 85 m.) dont l’une des tours constitue le clocher de San Maurizio Maggiore (Cf photo à droite) et à côté duquel se trouvait le palais impérial (Cf. l’église de San Giorgio « al Palazzo »). Il ordonna la construction de son mausolée et d’un sarcophage en porphyre rouge d’Égypte, aujourd’hui baptistère de la Cathédrale (Cf. photo ci- dessus à gauche). Les pilastres des arcades de deux magasins monumentaux se trouvent aujourd’hui à San Simpliciano. D’un temple restent les 16 colonnes transportées dans l’église de San Lorenzo Maggiore (Cf photo à droite). De l’époque romaine restent encore de nombreux objets de sculpture et de peinture, comme la tête colossale de Jupiter retrouvée près de la Porte Giovia, ou des sarcophages et des monnaies (Cf. photos à gauche : tête de Jupiter, et page suivante : sarcophage de l’ère constantinienne, et monnaie portant la tête de Maximien). C’est à Milan que l’empereur Dioclétien décrète les persécutions les plus dures contre les chrétiens qui étaient remontés jusqu’à Milan dès le 1er siècle grâce à St Barnabé, selon la légende, cousin de Marc l’Évangéliste et compagnon de saint Paul (mais il n’est jamais venu en Italie) et plus probablement par le grec Anatalone, qui aurait été le premier évêque de Milan (53-61). Au second siècle sont martyrisés à Milan Saint Vital, sa femme Valérie et ses fils Gervais et Protais ; Victor, Nabor et Félix y furent aussi martyrs sous Maximien, soldats maures convertis au christianisme et qui avaient quitté l’armée, redécouverts par saint Ambroise. -C’est aussi de Milan que l’empereur Constantin proclama son Édit qui abolissait toute discrimination religieuse vis-à-vis du christianisme (313), avant que celui-ci ne devienne  religion de l’État romain et qu’on ne lui restitue tous ses biens confisqués par le fisc romain. Aussitôt, le nombre de catholiques se multiplia, en particulier grâce à l’apostolat des évêques de Milan, dont on sait malheureusement peu de choses sûres, car les Milanais au XIe siècle arrangèrent l’histoire de leurs évêques pour leur donner une ancienneté aussi grande que celle des évêques romains. On parle d’un saint Anatole (Anatolone) qui aurait été envoyé par saint Barbabé, puis d’un saint Calimero, martyrisé et, selon une tradition fantaisiste,  jeté dans un puits qui figure toujours dans l’église qui lui est dédiée à Milan (Ve siècle. Cf photo ci-contre de la basilique restaurée et du puits), puis d’un saint Mirocle, attesté pour avoir participé au Synode de Rome contre les donatistes (des « purs » qui refusaient la validité des sacrements délivrés par des évêques qui avaient cédé à la persécution et livré des textes sacrés aux Romains) en 313. On eut ensuite saint Eustorge (344-349), hostile à l’arianisme, auquel est dédiée une des grandes églises de Milan (Cf photo ci-contre), avant d’arriver à saint Ambroise (340-397), fils d’un préfet de Rome, haut fonctionnaire romain, nommé gouverneur à Milan où il fut élu évêque par la vox populi, de 374 à sa mort en 397, contre l’évêque arien Aussensius (355-374) soutenu par l’empereur Constance II ; il combattit les ariens, défendit les droits de l’église face à l’empereur et composa de nombreux ouvrages qui en font un des pères latins du christianisme. Il fut aussi grand constructeur, faisant édifier les plus grandes basiliques de Milan, la basilica Apostolorum (San Nazaro Maggiore), la basilica Martyrum  (Sant’Ambrogio, 387), la basilica Salvatoris (San Dionigi) détruite au XVIIIe s.pour faire les Jardins Publics, la basilica Virginum (San Simpliciano, 397, décorée plus tard par les fresques représentant la victoire de Legnano sur l’empereur.  Cf. photo ci-contre) et le baptistère di San Giovanni alle Fonti. Il poussa l’empereur Théodose à proclamer le christianisme religion officielle de l’empire et à interdire les cultes païens, et fit reconnaître le rite milanais (« ambrosien ») dans la musique sacrée. Il faut ajouter d’autres églises, dont San Lorenzo Maggiore, dont les formes sont bien reconnaissables malgré les restaurations, et qui reste un des monuments chrétiens les plus importants (Cf photo page suivante : San Lorenzo Maggiore reconstituée comme elle était après les restaurations romanes).
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2 – Milan de l’empire romain à la commune libre Milan perd de son importance avec la crise de l’empire, et en 402, Honorius, fils et successeur de Théodose, lui ôte le titre de capitale de l’empire, inspiré par le général vandale Stilicon, son conseiller et tuteur. Milan subit alors le choc des invasions « barbares » : les Wisigoths passent les Alpes en 401, suivis des Burgondes appelés par Odoacre en 489, des Francs, des Vandales, des Huns (Attila dévaste la ville en 452) et des Goths d’Alaric venus de Grèce. Les envahisseurs furent séduits par l’opulence d’une ville mal protégée et commencèrent à la piller et à détruire les monuments. En 488, arrivèrent 100.000 Ostrogoths, population germanique d’origine ukrainienne, guidés par Théodoric, nommé consul et chef des armées par Zénon, l’empereur d’Orient. Théodoric l’emporta sur le roi barbare Odoacre qui avait déposé le dernier empereur romain en 476, et il s’empara de Milan en 493, malgré la défense des Burgondes, mais il déplace sa capitale à Ravenne et Milan ne reste qu’une des villes importantes à côté de Pavie ou Vérone. En 535, l’empereur Justinien envoya le général Bélisaire libérer l’Italie des Ostrogoths, et en 538, les citoyens milanais, plus latins que germains, chassèrent les Ostrogoths de la ville ; pour se venger, le Goth Uraia assiégea Milan, la conquit, détruisit toutes les églises et les maisons et massacra beaucoup d’habitants ; la mort de leur chef Totila mit fin à la domination des Goths en 551, et le général byzantin Narsès remporta la victoire. En 568, trois ans après la mort de Justinien, arrivèrent des tribus germaniques et slaves, guidées par le Longobard Alboin. Les Longobards conquirent toute la plaine du Pô, jusqu’à Milan en 569, et bientôt presque toute l’Italie ; les autorités de la ville et le clergé s’enfuirent à Gênes pour un exil de 70 ans. Pavie fut proclamée capitale de l’empire longobard en 572 et Milan ne fut que la résidence d’un des « ducs » longobards (cf. la permanence du nom de « Cordusio », de Curia ducis, lieu où le duc exerçait son pouvoir). Le royaume carolingien (774-888) maintint la capitale à Pavie, mais Milan, dirigée par un comes (comte), commença à reprendre de l’importance grâce à l’autorité de ses archevêques qui jouirent d’un grand prestige, dans la tradition d’Ambroise ; une vingtaine d’évêques dépendent de Milan, ils sont riches, propriétaires terriens, et souvent plus « seigneurs féodaux » que prêtres. Parmi eux, Ansperto da Biassono (868-881) fit restaurer les murailles, les églises et les hôpitaux, redonnant une vie commerciale à la ville par le développement des échanges avec l’autre côté des Alpes. Pendant toute la période des Othon de Saxe, il y eut une solidarité entre les évêques milanais et les empereurs : l’archevêque Landolfo de Carcano investit Othon I le Salique  roi d’Italie en 1024 dans la basilique de S. Ambroise ; l’archevêque Ariberto d’Intimiano (1018-1045) couronne Conrad II le Salique roi d’Italie à Milan en 1024 et empereur à Rome en 1026. Ariberto donne comme enseigne à l’armée milanaise le « Carroccio », qui allait accompagner les Milanais dans toutes leurs batailles durant le Moyen-Âge, avec le « biscione » (la couleuvre). La reprise économique et démographique se confirme au Xe siècle. Très influente est la couche sociale des plus grands feudataires archi- épiscopaux, les « capitanei », détenteurs de propriétés, châteaux et droits seigneuriaux sur le territoire. À côté d’eux se trouvaient les « valvassori », insérés dans la hiérarchie féodale et chevaliers, mais de rang inférieur, et une nouvelle classe de « cives », marchands, artisans, notaires, juges, qui obligea les nobles à un accord en 1044. En 1097, ils constituent ensemble un Consulat, première expression institutionnelle de la Commune, qui revendique le gouvernement de la ville ; elle se réunissait dans le « brolo » (le jardin) de l’archevêque, puis s’émancipa de sa tutelle, en s’installant dans le palais communal, le « broletto ». Les luttes de classes furent donc dures dans cette progressive invention de la Commune milanaise, se croisant avec les luttes pour la conquête du pouvoir dynastique en Italie et avec les concurrences pour le choix de l’évêque. Trois évêques ont eu un rôle particulièrement important, d’abord Landolfo da Carcano, élu en 979 par la volonté de l’empereur Othon II ; cette élection causa de violents troubles sociaux, qu’il réussit à calmer en rendant héréditaire le droit pour les nobles (appelés capitanei de par leur propriété d’un fief in capite, à leur nom) d’encaisser les revenus des paroisses ; cela donna aux capitanei (les milites maiores) un pouvoir de plus en plus grand qui mécontenta les  valvassores (secundi milites) qui n’étaient que leurs vassaux et étaient donc souvent en violente opposition à eux et à l’archevêque. Landolfo eut pour successeur Arnolfo da Arzago (998-1018), très amateur de luxe et favorable à l’empereur, puis Ariberto d’Antimiano (1018-1045), élu avec l’appui des capitanei et de l’empereur, qui réorganisa l’Église de Milan, fonda le monastère et l’hôpital de San Dionigi et fit reconnaître la suprématie de l’évêque de Milan sur les autres évêques du Nord, entre autres celui de Ravenne (Voir ci-dessus sa tombe dans la cathédrale de Milan). C’est en 1035 qu’éclata la première révolte des valvassori, qui trouvèrent appui auprès de Lodi hostile à Ariberto qui lui avait imposé par les armes son évêque Ambroise et dont certains territoires étaient des fiefs contrôlés par des nobles milanais. L’empereur intervint, – occasion pour lui de diminuer le pouvoir de l’évêque de Milan –, fit interner Ariberto ; mais celui-ci fut délivré par les Milanais, et Ariberto, craignant une réaction de l’empereur, fit renforcer les murailles (et c’est à cette occasion qu’il institua le Carroccio comme emblème de l’armée). L’empereur Conrad II assiégea en vain la ville, et abandonna finalement, après avoir cependant laissé un cadeau empoisonné, la Constitutio de feudis (mai 1037) qui étendait aux valvassori le caractère héréditaire des fiefs. Le peuple milanais soutint Ariberto qui lui apparaissait comme le meilleur gage d’autonomie de leur ville. Il y eut une seconde explosion sociale, en 1042, celle des cives guidés par un noble dissident, Lanzone da Corte ; ils chassèrent de la ville capitanei et valvassori avec leurs familles que l’archevêque accompagna. On arriva à l’accord de 1044. La noblesse perdit pour un temps son pouvoir et une égalité sociale légale s’établit : c’étaient les bases de la Commune. L’évêque suivant fut Guido da Velate (1045-1071) imposé par Henri III ; sous son épiscopat, la simonie et le concubinage se répandirent dans une partie importante du clergé. Cela produisit une réaction populaire très forte, celle des Patarins, qui affirma sa volonté de réformer ce clergé corrompu. « Patarino » signifiait « chiffonnier », du nom de la Pataria, un quartier pauvre de Milan. Ils avaient pour chefs des moines soldats comme Arialdo da Carimate et Landolfo Cotta, et un noble laïc, frère de Landolfo, Erlembaldo Cotta (Voir ci-contre le bas-relief du XIXe siècle à San Calimero de Milan). Ils luttèrent militairement contre les nobles qui soutenaient le parti épiscopal. Ils connurent une reconnaissance grâce à l’élection d’un des leurs, Anselmo da Baggio, comme pape, sous le nom d’Alexandre II, en 1061 ; celui-ci amorça la réforme du clergé poursuivie par ses successeurs Grégoire VII (1073) et Urbain VIII (1088). Guido da Velate et les prêtres concubins s’opposèrent aux réformes, en les présentant comme une atteinte à l’autonomie de l’Église ambroisienne. Excommunié par l’évêque, Arialdo obtint finalement l’excommunication pontificale pour Guido da Velate qui provoqua contre lui des troubles, le fit arrêter, torturer et jeter dans le Lac Majeur en 1066 (Voir page précédente le martyre de S.Arialdo à San Calimero de Milan). Guido fit acte de soumission au pape, mais vendit son diocèse à un de ses disciples, Gotofredo da Castiglione, qui fut approuvé par l’empereur Henri IV en 1071. Ses partisans firent assassiner Erlembaldo, qui fut canonisé comme martyr avec son frère par Grégoire VII. mais Henri IV nomma à Milan un autre évêque excommunié par le pape, Tebaldo da Castiglione (1075-1085). Le pape Grégoire VII l’emporta finalement sur l’empereur Henri IV, lui imposant sa soumission au château de Canossa. Le mouvement patarin s’arrêta vers le fin du siècle, et les franges qui subsistèrent n’acceptèrent pas les décrets publiés par Urbain II en 1089, qui déclaraient valides les sacrements délivrés par des prêtres simoniens ou corrompus ; elles furent assimilées aux  cathares et condamnées comme hérétiques. Au milieu de ces troubles religieux, Milan s’était enrichie de la participation des trois classes de citoyens, et mettait au point un nouvel ordre territorial. On a connaissance de l’existence d’un premier Consulat dès 1097 ; en faisaient partie des représentants des différentes classes ; parfois c’était un noble qui représentait les cives, comme ce fut le cas de Lanzone da Corte. L’institution communale fut le résultat de ce pacte : le Magistrat des Consuls entra en fonction dès 1099, et en 1122, la ville fut représentée par 20 Consuls, même si l’archevêque restait formellement son chef. Milan commença alors son expansion territoriale aux dépens des communes voisines plus faibles, pour mieux contrôler le commerce de l’aire transalpine et assurer l’extension des intérêts fonciers de ses citoyens riches ; cela provoqua de nouveaux conflits, avec Côme (soumise en 1127) et Lodi (détruite en 1111). Le succès de la première croisade (1096) poussa en Lombardie une foule de pauvres, immigrés, chômeurs, à partir pour la Terre Sainte, 200.000 selon les Chroniqueurs du temps, mais en réalité autour de 20.000. Peu de soldats, aucune discipline, beaucoup de vieillards, de femmes et d’enfants guidés par Anselme, archevêque de Milan. Ils partirent en septembre 1100, et arrivèrent à Constantinople déjà largement fauchés par la maladie et la fatigue. Difficiles à contenir, ils se livrèrent au pillage ; ils reprirent la route de la Terre Sainte en mai 1101 et furent massacrés par les Turcs, tandis que femmes et enfants  étaient emmenés en esclavage. Cela a inspiré à Giuseppe Verdi son opéra Les Lombards à la première croisade, sur livret de Temistocle Solera, créé à la Scala de Milan en 1843.
Un des symboles militaires de Milan, auquel les troupes communales faisaient sans cesse  référence pendant la bataille, était l’insigne avec la vipère qui dévore un enfant, le biscione.  Tant que l’insigne était visible, rien n’était encore perdu et tout était possible. Plus tard, on  retrouvera le biscione dans l’emblème des Visconti (couleuvre bleue sur champ blanc)  ;  aujourd’hui, nous la retrouvons sur le blason qui se trouve sur le capot de l’Alfa Romeo, la  grande industrie automobile milanaise. Les origines de cet objet symbolique  sont  antérieures à l’époque communale. La légende qui veut que l’emblème ait été pris sur le  bouclier d’un Sarrasin n’a aucun fondement. Il est au contraire plus probable qu’il ait été  pris à un symbole totémique longobard, devenu ensuite symbole militaire de la ville. La  première opération qui devait être accomplie quand les troupes installaient leur campement  était de placer la vipère en haut d’un lance ou sur la branche la plus haute d’un arbre.  L’emblème fut déjà le drapeau de la commune durant la croisade de 1100. Bien plus, les  drapeaux milanais qui allèrent en Terre Sainte furent au nombre de deux  : l’un avec la  vipère bleue sur champ blanc, flottait sur le campement pendant les périodes de trêve  ;  l’autre, avec la croix rouge sur fond blanc, flottait durant la bataille. Au terme de la croisade,  dans la bouche de la vipère fut placé un enfant sanglant.  À gauche, le biscione, tiré du « Libro dei Censi » (Sienne, Archives de l’État)
Le « Carroccio » était un grand char à quatre roues, tiré par des boeufs, sur lequel, devant le gonfalonier de la commune de Milan, était dressé un autel. Pendant le combat, le prêtre célébrait la messe et un clerc sonnait en permanence la « martinella », une cloche placée sur l’autel. Il semble que le carroccio ait été une invention de l’archevêque Ariberto d’Antimiano (1039), qui la proposa comme symbole de la liberté et de la foi religieuse de la commune. Sa perte était considérée comme une honte. Il fut ensuite adopté aussi par d’autres communes, jusqu’au XIVe siècle. Cf sopra, il carroccio d’Amos Cassioli (1832-1891)
Liste des archevêques de Milan dansl la cathédrale.
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