Création culturelle

Architecture


Castelli d'Italia


Les châteaux d'Italie

(Texte revu de la conférence de Jean Guichard, donnée à La Tour du Pin pour La Tour Prend Garde le 17 janvier 2018)

Le château est l'un des types de monuments d'Italie les plus importants en nombre et en qualité, même si beaucoup sont à l'état de ruines, qu'on travaille souvent à restaurer actuellement, car le château est l'un des éléments qui permettent de mieux comprendre toute l'histoire d'Italie.

Le château, avec la villa, le palais, l'église, est l'un des monuments les plus significatifs de l'histoire d'une ville, d'une région, d'une civilisation. C'est aussi ce que montre votre maquette de l'ancien château de La Tour du Pin ((Cf. ci-contre, à droite), dont la plupart des habitants ignoraient l'existence, passant ainsi à côté de leur propre histoire. Et maintenant, on peut acquérir un château à plusieurs : Télérama parlait récemment de 25.000 personnes qui ont acheté un château pour financer sa restauration.

Ô saisons, ô châteaux !

Quelle âme est sans défauts ?

Commençons par cette référence de Rimbaud. Que sont ces "saisons" ? Que sont ces "châteaux" ? Les "saisons", c'est le rythme de la nature, des arbres, de la reproduction, un rythme féminin ; les "châteaux", c'est le rythme de l'homme. Le château est un symbole de pouvoir, mais de pouvoir masculin. Le château c'est le monde du guerrier qui défend son bien, du mâle, celui qui défend, protège, ses sujets, sa femme, ses enfants, contre le guerrier voisin. La femme est "protégée", donc dépendante de son maître, le "seigneur". Le château est le règne de l'homme. Pensons seulement au caractère phallique de la tour du château, le grand donjon dressé, qui restera, même dans les futurs palais urbains un symbole de pouvoir, que l'on fait monter ou que l'on coupe selon que le pouvoir augmente ou diminue ! N'oublions jamais ce premier rappel : le château ne nous raconte que l'histoire "dominante", celle de la classe au pouvoir, mais pas celle des 90% de la population paysanne, sinon dans leur soumission au pouvoir dominant, quand ils sont bien "protégés". Mais il est plus séduisant de visiter un château, pour nous qui n'avons pas de château, cela nous fait plus rêver que de visiter la chaumière d'un pauvre bûcheron, d'un pêcheur ou d'un charretier : à Marano Lagunar dans le Frioul, on ira plutôt visiter la tour que les pauvres maisons de roseaux (les "casòn") des pêcheurs (Cf. ci-dessus) qui sont pourtant aussi importantes historiquement.

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1. D'où vient le mot "château" ?

D'abord pluriel du provençal "chastel" (les "chastaux", du XIIe siècle), il est issu du latin "castellum", la forteresse, lui même diminutif de "castra", la forteresse, le lieu retranché, "castrum" désignant plutôt une localité édifiée à partir ou autour d'un camp. C'est bien dès l'origine, et déjà dans l'antiquité romaine, un terme de défense et de guerre. Ce n'est que bien plus tard que le "château" indiquera la résidence luxueuse des familles aristocratiques, manifestant leur grandeur sociale, leur richesse et leur pouvoir politique. Le château de Nicolas Fouquet à Vaux-le-Vicomte (1653) inspira ensuite Louis XIV à construire Versailles qui devint un modèle international (Exemple : la "Reggia", le Palais Royal de Caserta en Campanie).

Les linguistes relient aussi le mot à "casta", chaste, c'est-à-dire "retranchée" de la vie sociale, affective, sexuelle. Un bon exemple est le plan du "castrum" de Turin, qui commande toute l'histoire du développement de la ville : un rectangle entouré de murailles parcouru de deux voies principales, le "decumanus" (axe est-ouest) et le "cardo" (axe nord-sud) avec une porte à chaque extrémité, que l'on discerne encore très bien quand on se promène dans Turin.

Un autre exemple est le plan du "castrum" de Castelvetro près de Modène (Émilie-Romagne), où l'on voit mieux ce qui donnera sa structure aux futurs châteaux : en haut à droite le logement des officiers (qu'on retrouvera dans les châteaux de Lucera ou de Milan dans le Castel Sforzesco - Voir plus loin), en bas et en haut à gauche les divers bâtiments destinés aux soldats, aux magasins, aux entrepôts, etc.

Le château est toujours aussi un indice important du type de civilisation dominant. Dans les civilisations agricoles ou pastorales anciennes stables, il est un élément de défense extérieure en même temps que de pouvoir intérieur (c'est là que réside le chef de la communauté). À l'opposé les civilisations nomades ne construisent évidemment pas de châteaux.

Prenons un exemple en Sardaigne avec les "Nouraghes" du Xe au IIe siècles av.J.C. D'abord celui de Barumini, un des plus importants. On y distingue encore bien la grande résidence du chef, dominant les maisons de la tribu, entourées d'un grand mur de protection et d'une seconde muraille plus ample (Cf. à gauche et ci-dessus les reconstitutions qui évoquent très directement les châteaux du Moyen-Âge).

Un second exemple est celui d'Arrubiu (Cf. reconstitution ci-contre à droite). Il y en a des centaines.

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2. Les civilisations urbanisées, "civilisées"

Le mot vient de "cives", le citoyen d'une ville ; comme déjà la Rome antique, ces civilisations construisent moins de châteaux qu'elles ne fortifient les murailles des villes, et le château n'est qu'un élément de la muraille (Voir un élément de la muraille d'Aurélien, 271-282 apr. J.C.). Un exemple caractéristique, l'évolution du Palazzo Madama de Turin : c'est d'abord une porte de la muraille romaine qui entoure la ville (comme l'autre porte encore visible à Turin), puis au Moyen-âge, on utilise la porte pour faire une façade d'un château-fort ; lorsque le Piémont devient un Duché, puis un Grand-Duché, puis une monarchie, le château devient un splendide palais royal pour "Madame", la sœur du roi, et on ajoute devant la façade du côté de la ville une façade baroque dotée de grandes baies vitrées, à travers lesquelles le peuple peut voir depuis la place les fêtes et les bals donnés par la famille royale. Le château devient moins un lieu de défense qu'une résidence seigneuriale, un lieu de pouvoir et de démonstration de richesse, de grandeur et de supériorité.

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3. Au Moyen-Âge, le château sera un élément caractéristique de la société féodale.

On ne peut pas s'arrêter sur la définition de la féodalité qui est trop complexe et souvent déterminée dans nos têtes par la littérature romantique. Disons que c'est une société "décentrée", parcellisée, où le pouvoir central "délègue" ses fonctions à une multitude de seigneurs puissants, marquis, comtes, ducs, évêques, qui, à leur tour, délèguent à des vassaux plus petits, mais dont chacun constitue un centre nouveau de pouvoir. Dans le meilleur des cas (Charlemagne, à gauche vu par Durer, ou Frédéric II, à droite avec son faucon, XIIe siècle), c'était pour assurer l'unité et la paix de cet immense territoire qu'était l'empire romain germanique. Vu l'immensité de l'empire et les difficultés de communication (les routes romaines s'étaient considérablement dégradées), ce mode d'exercice du pouvoir est devenu une nécessité, et cela explique qu'il y ait une telle quantité de châteaux : le vassal "délégué", lié à son souverain par le "droit féodal", commence par se faire construire une demeure fortifiée. Le château est donc à la fois résidence du Seigneur, lieu de son pouvoir économique, politique, judiciaire, culturel et lieu de défense contre les attaques extérieures et de refuge pour ses paysans, qui, se sentant "protégés", pourront vaquer plus sereinement au développement des activités productives sur les terres dévolues au seigneur.

Les fonctions du château sont multiples : fonction militaire de défense des domaines du seigneur et de ses sujets contre les incursions des seigneurs voisins, fonction juridictionnelle (la justice est rendue dans le château), fonction économique (tous les produits de la terre et des activités du domaine (moulins, fours...) convergent vers le château), fonction politique (de là partent les ordres du seigneur et là lui sont rendus les hommages de ses subalternes), fonction sociale (c'est au château que se retrouvent aussi bien les bouffons que les marchands de passage et les jeunes à la recherche d'un emploi militaire), fonction culturelle enfin (la richesse du seigneur lui permet d'accueillir les meilleurs peintres, musiciens, lettrés, artisans). C'est une "cour", reproduction du pouvoir central de l'empereur ou du roi, mais aussi créatrice d'une forme d'esprit, d'une vision du monde, qui va marquer tout le paysage italien par le grand nombre de châteaux encore existants ou de toponymes dérivés d'un château préexistant : nous avons compté plus de 750 localités italiennes dont le nom commence par "castel" ou "castello".

Et puis se produit une crise du pouvoir après la fin de l'empire carolingien : il n'y a plus de protection possible de la part des autorités centrales contre les menaces d'invasions sarrasines, normandes (vikings), hongroises. Les petits seigneurs locaux furent donc obligés de se défendre par eux-mêmes, et ils construisirent des châteaux, en utilisant parfois des fortifications ayant existé précédemment, souvent depuis l'Antiquité, d'abord en bois puis en pierre, et cela permit aussi aux populations locales de se réfugier avec leurs animaux en cas de danger : ils choisissaient des lieux loin des voies de communication mais proches des villes pour pouvoir s'alimenter chez les commerçants urbains.

Abandonnons aussi l'idée que la "féodalité" ne dure que du VIIIe au XIIe siècle et qu'elle a été remplacée par la domination des "communes" libres anti féodales. Certes les communes ont été hostiles à l'ancienne féodalité et ont cherché à la remplacer, mais elles l'ont surtout intégrée, et dans cette Italie multiforme d'aujourd'hui, le système féodal continue à être un élément de la société.

Faisons donc un petit tour d'Italie, du Nord au Sud, j'ai privilégié à la fois les lieux les plus importants et ceux que je connaissais le mieux (pour une vision plus complète, voir la bibliographie et sur Internet : castelli italiani per regione), mais j'insiste : la diversité de forme des châteaux sera grande, en fonction de l'époque, de la région, du rapport existant entre ville et campagne, etc. Vous retrouverez les châteaux cités sur la carte en annexe, avec ses 20 régions : au Nord, Val d'Aoste, Piémont, Ligurie, Émilie-Romagne, Lombardie, Trentin-Haut Adige, Vénétie, Frioul ; au Centre : Toscane, Marches, Abruzze, Molise, Ombrie, Latium ; au Sud : Campanie, Pouilles, Basilicata (Lucanie), Calabre, Sicile, Sardaigne.

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a) L'Italie du Nord

Castello di Graines - Valle d'Aosta
Lieu stratégique, à 1300 m. d'altitude, qui contrôlait les cols vers le Nord et la Suisse, vers l'Est, vers l'Ouest et vers le Sud. Construit en 515 pour protéger le monastère de St Maurice d'Agaune et l'immense fief qui en dépendait ; donné en fief en 1263 aux Challant, fidèles féodaux des comtes de Savoie qui l'administrent jusqu'à la fin du XVIIIe siècle.

Castello d'Aymavilles - Valle d'Aosta
Il contrôlait la vallée centrale du Val d'Aoste. Plan quadrangulaire avec 4 tours d'angle dotées de mâchicoulis (= caditola) permettant de lancer des projectiles en tir plongeant, et de corbeaux (= beccatello) soutenant la partie qui dépasse du mur (deux corbeaux avant avec motifs guelfes et deux arrière avec motifs gibelins). Construit en 1287, donné ensuite aux Challant par les comtes de Savoie, et doté d'une double enceinte avec fossé derrière lesquels pouvaient se protéger les populations. Au XVIIIe siècles les Challant ajoutent les loges baroques entre les tours. Il est maintenant propriété du Conseil Régional, qui l'a ouvert au public en 2017. (Voir à droite sa reconstitution dans sa forme médiévale).

Castello di Fenis - Valle d'Aosta.
Il est attesté à partir de 1242, c'est une des plus importantes propriétés des Challant, qui le font décorer et agrandir entre 1320 et 1420, avec une partie centrale pentagonale, et des fresques du grand peintre piémontais Jacques Jaquerio (1375-1453). Sa majesté traduit surtout la puissance des Challant. Restauré par Alfredo d'Andrade (1839-1915) à partir de la fin du XIXe siècle, il est reproduit dans le château du Parc Valentino à Turin où on peut voir les fresques de la cour. On en a une maquette qui dira quelque choses aux turripinois.

Castello di Verzuolo - Cuneo (Piemonte).
Il est édifié en 1377 par le marquis de Saluzzo sur des ruines de 1159, de forme carrée avec des créneaux gibelins, 4 tours d'angle, deux carrées et deux rondes, entouré d'un fossé. Transformé ensuite en palais de villégiature, quand le marquisat de Saluzzo est conquis par la Savoie. Mis en vente en 2016 pour 1.800.000 euros...

Castello di Grinzane Cavour - Cuneo (Piemonte)
construit entre XIIIe et XIVe siècles par un marquis de Busca, puis repris par la famille de Tonnerre, les oncles de Camillo Benso comte de Cavour (1810-1861) qui s'y trouve à partir de 1830, et développe l'agriculture (marché de truffes blanches), la viticulture (voir l'œnothèque Régionale du Piémont) ; les deux petites tours sont du XVIe siècle

Castello della Manta - Cuneo (Piemonte)
Construit au XIVe siècle au pied du Monviso, sur des restes de la fortification du XIIe siècle, par le marquis Valerano de Saluzzo, qui en fait une résidence seigneuriale, décorée en style gothique courtois, faisant les portraits des membres de la famille sous la figure de 9 héros mythologiques et bibliques et illustrant le thème de la Fontaine de Jeunesse, rare fresque restant d'un thème courant mais détruit ensuite par les tenants de la morale catholique : les humains arrivent à gauche vieux, infirmes et malades ; ils se plongent dans la fontaine et en ressortent jeunes, vigoureux, et sexuellement actifs. Le marquisat de Saluzzo dura du XIIe siècle jusqu'au Traité de Lyon de 1601 qui le remet à la famille de Savoie. En 1984, la comtesse héritière a fait don du château au FAI (Fondo Ambiente Italiano, Fonds pour l'Environnement Italien).

Castello di Sirmione (Rocca Scaligera), Veneto
Durant tout le XIIIe siècle, Sirmione est déjà organisée en commune libre qui fait partie du domaine des Scaliger de Vérone qui font construire vers 1277 le château doté de créneaux gibelins, qui protège le bourg et le port contre des attaques possibles de Mantoue et de Milan. Il est construit sur les restes d'une fortification romaine et au XIVe siècle les Scaliger ajoutent la "darsena", la darse, le bassin abrité qui permet l'entretien des bateaux. En 1405, la ville et le château deviennent possession vénitienne. Une légende raconte que le fantôme d'un des maîtres du château continue à errer dans la Rocca les nuits de tempête. Ce sera le fait de nombreux châteaux que d'avoir ce mystère, entretenu ensuite par la littérature romantique... et par certains guides touristiques.

Castello di Soave - Veneto
C'est un autre château ayant appartenu aux Scaliger, seigneurs de Vérone, mais il existait déjà depuis le XIe siècle. Après la disparition des Scaliger, qui règnent de 1262 à l387, le château passa aux Visconti, puis à Venise. Les Scaliger (Della Scala) étaient des gibelins, alliés de l'empereur, d'où le choix de leurs créneaux gibelins en queue de pie.

Castello di Avio - Entrée de l'Alto-Adige.
C'était un des principaux points de passage entre la plaine du Pô et l'Allemagne, sur une voie qu'utilisaient déjà les Romains, la Via Claudia Augusta de 15 av.J.C. On sait qu'il y avait déjà un château en 1053, le donjon est du XIe siècle, trapézoïdal, structure particulière dans ces édifices ; on y accédait par une porte surélevée qui nécessitait l'usage d'une échelle ; il passe aux Vénitiens en 1411, et au XVIIe siècle à la famille des Castelbarco. En 1977, Emanuela Castelbarco, nièce d'Arturo Toscanini, en fait don au FAI qui le gère. Le château avait trois murailles d'enceinte et cinq tours ; il était décoré de nombreuses fresques profanes du début du XIVe siècle représentant des allégories d'amour et de vie quotidienne ou de guerre : il y en avait beaucoup dans les châteaux, mais la plupart ont été détruites par la suite.

Rocca Malaspina di Massa (Toscana) - Entre Toscane et Ligurie
La forteresse existait déjà en l'an 1000, c'était un lieu stratégique pour le contrôle de la côte jusqu'à Livourne et de la frontière entre la Ligurie et la Toscane, et donc très disputé entre Gênes, Lucques, Pise, Florence et les Visconti de Milan. Ce sont d'abord les Obertenghi qui commencent la construction au Xe siècle, sur un lieu probablement déjà occupé par les Romains ; parmi les divers occupants de Massa, les plus importants furent les Malaspina à partir de 1442, ils forment un nouvel État sous la protection de Florence ; les Malaspina étaient les descendants des Obertenghi depuis 945, ils agrandissent le château, qui garde la trace de toutes les périodes de construction, et ils améliorent son aspect résidentiel.

Rocca di San Leo - Rimini (Emilie-Romagne)
Elle existe depuis le IXe siècle sur la base d'une fortification romaine et devient la capitale du domaine des Montefeltro, et Federico da Montefeltro le fait réadapter par l'ingénieur Francesco di Giorgio Martini. Le fort est donné en 1631 à l'État pontifical qui en fait une prison où est enfermé de 1789 à 1795 Joseph Balsamo, comte de Cagliostro (1743-1795). Il comprend aujourd'hui un Musée d'armes et une pinacothèque, avec des souvenirs de Cagliostro.

C'est l'occasion de dire deux mots de l'architecte, Francesco di Giorgio Martini (1439-1501), un des grands maîtres, peintre, sculpteur, et surtout architecte militaire, praticien et théoricien, comparable à Léonard de Vinci avec lequel il a d'ailleurs travaillé. Dans un de ses livres il compare la forteresse à la tête dans le corps humain, et il combinait esthétique et efficacité militaire : c'est un des premiers constructeurs de tours rondes pour diminuer l'influence, qu'il qualifiait de "diabolique", de la bombarde. Voir son dessin à gauche, et son château de Sassocorvaro, près d'Urbino, en forme de vaisseau, à droite

Castello di Bardi - Parme - Émilie-Romagne
il fut important parce qu'il contrôlait une voie de pèlerinage essentielle, la Via Francigena. Le nom de "Bardi" vient du temps des "Longobardi" ; il est commencé au IXe siècle, et en 898, il servit de refuge à l'évêque de Piacenza quand il y eut une attaque hongroise ; puis en 1257, il fut acheté par Ubertino Landi, un gibelin qui en fit le domaine de sa famille et un lieu de combat contre les troupes guelfes ; au XVe siècle, il fit modifier les fortifications en fonction de l'évolution des techniques d'armement. La forteresse devint ensuite résidence princière, puis une prison, aujourd'hui un Musée de civilisation locale (Cf. sa photo à droite et à gauche).

Castello di San Giorgio - La Spezia (Ligurie)
il est construit en 1262 par Nicola Fieschi qui renforce un ancien fort existant sur la colline de Poggio. Reconstruit ensuite par le Doge Simone Boccanegra avec créneaux gibelins en 1343. Restauré par le Royaume d'Italie et devenu siège d'un grand Musée archéologique.

Mais il faudrait en ajouter beaucoup d'autres.

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b) L'Italie centrale

Castello dell'Abbadia - Viterbo- Latium
Il est construit pour protéger un ancien pont étrusque (Pont de l'Arc-en-ciel ou du Diable, IIIe s. av.J.C.), il fut d'abord une abbaye bénédictine au IXe siècle, fortifiée pour se défendre contre les invasions sarrasines. L'essentiel de ce qu'on voit relève du XIIe siècle. Il appartint entre autres aux Farnese dont le cardinal Alessandro, futur pape Paul III, aimait venir y séjourner. Il est aujourd'hui le siège du Musée Archéologique de Vulci.

Castello del Piagnaro - Pontremoli - Toscane
Il est construit à partir du XIe siècle pour contrôler et défendre les voies de communication aussi importantes que la Via Francigena et autres voies commerciales. Son nom de "Piagnaro" vient des "piagne", les dalles en grès utilisées en Lunigiana pour construire les toits des habitations. Il connut maintes destructions et reconstructions adaptées aux nouvelles techniques d'armement.

Rocca Monaldeschi della Cervara -Bolsena - Latium
On en connaît l'existence depuis 1156, quand le pape Adrien IV, en vue des incursions de l'empereur Frédéric Barberousse, fit fortifier les centres de la Via Cassia (les murs d'enceinte de Bolsena), et construire ce château en quadrilatère avec ses 4 tours de défense qui permettaient la disposition des lignes de défense : une des 4 est surmontée de créneaux guelfes, c'était une tour de défense primitive. Les Monaldeschi, puissante famille guelfe descendant de la famille d'Anjou, s'y installent à partir de 1295 et transforment peu à peu le château en résidence princière, avant qu'il ne devienne une prison puis un dépôt jusqu'à la restauration de 1970.

Rocca Albornoziana di Spoleto - Ombrie.
Située au-dessus de Spoleto, c'est la plus importante forteresse du système de défense des territoires pontificaux de l'Ombrie institué par le pape Innocent VI, après le retour des papes de l'exil d'Avignon : elle est construite de 1363 à 1367 par le cardinal espagnol Egidio Albornoz, qui la fit organiser de façon à être très solide et défensive en même temps qu'élégante pour y recevoir des hôtes illustres. Elle devient une prison de 1817 à 1982.

Rocca Calascio - Abruzzes
Elle est commencée en 1140 par les Normands ; c'est la plus haute forteresse des Apennins (1460 m.), destinée à une fonction de surveillance et de cantonnement militaire. Les Abruzzes sont une des régions qui ont plus grand nombre de châteaux : c'était une région de transition entre le Nord et le Sud, souvent attaquée de part et d'autre et où il a donc fallu construire de nombreuses structures de défense (quelques centaines, dont beaucoup ont été abandonnées, ne laissant que quelques ruines), en particulier contre les attaques des Hongrois venus du Nord et des Sarrasins venus du Sud dès le Xe siècle. Celle-ci a un plan carré avec 4 tours d'angle rondes et un donjon carré au centre. Elle dominait et protégeait le village qui était un des grands lieux de passage des troupeaux de moutons en transhumance. Elle est dévastée par un tremblement de terre en 1703.

Elle est proche du village de Santo Stefano di Sessanio, doté de sa tour Médicis, avec ses créneaux et ses corbeaux guelfes (Cf. ci-contre à gauche).

Rocca Costanza di Pesaro - Marches
Modèle de "forteresse de plaine" à plan carré orienté sur les 4 points cardinaux, avec 4 grosses tours cylindriques angulaires. Construite en 1474 par Costanzo Sforza en remplacement de l'ancienne enceinte des Malatesta et sur l'ancien cimetière israélite. Occupée en 1500 par Cesare Borgia qui en fait faire le dessin par Léonard de Vinci qui inspirera ensuite les architectes français. C'est probablement aussi Léonard qui conseille la construction du grand fossé, devenu maintenant une belle promenade pour les habitants avec leurs chiens.

Castello di Bracciano - Odescalchi / Orsini - Latium
Il est d'abord une forteresse médiévale du XIIIe siècle, au bord du lac de Bracciano, et sur celle-ci Napoleone Orsini fait édifier en 1470 le château actuel, pentagonal avec ses 5 tours, sur projet de Francesco di Giorgio Martini ; c'est un des plus beaux exemples d'architecture militaire de cette époque. Somptueusement décoré de fresques, il passe aux Odescalchi en 1698. Il est un des plus grands châteaux et un des plus représentatifs des châteaux de caractère militaire passant peu à peu au stade de résidence seigneuriale des aristocrates de la cour des papes. En 1560, les frères Zuccari y ont peint des fresques à l'occasion des noces de Paolo Giordano Orsini et Isabelle de Médicis ; la salle d'armes des Odescalchi est très riche.

Torre Astura - Latium
Dans l'antiquité romaine il y eut une villa de Cicéron, fréquentée aussi par plusieurs empereurs, aujourd'hui complètement détruite et abandonnée sous la végétation. En 1193, le site fut occupé par les Frangipani qui y construisent une forteresse maritime pour se protéger des Sarrasins, avec une tour pentagonale reliée à la terre par l'ancien pont romain de la villa de Cicéron. La forteresse passe ensuite en possession de diverses familles romaines avant de revenir à la commune voisine de Nettuno dans les années 1970.

Castello di Civitella del Tronto - Abruzzes.
Une fortification existe depuis le début du XIe siècle pour défendre cette frontière nord du Royaume de Naples ; c'est une des plus grandes réalisations d'ingénierie militaire, à 600 m. d'altitude au-dessus de l'agglomération. Après la mort de Frédéric II, c'est Charles d'Anjou qui la fit restaurer et agrandir ; puis elle passa à la famille d'Aragon qui en fit une forteresse de 25.000 m2. En 1860-61, les soldats de Garibaldi durent l'assiéger pendant plus de 6 mois pour l'obliger à se rendre.

Castello Piccolomini di Celano - Abruzzes (L'Aquila).
Sur la base d'un château en bois et en terre battue de Frédéric II, au-dessus du lac de Fucino, fut construite en 1392 la fortification actuelle par le comte de Celano sur la colline de San Flaviano, avec des créneaux gibelins. Ce sont les Piccolomini, neveux du pape Pie II, qui poursuivirent le développement, transformant un château de défense en palais résidentiel, ouvrant par exemple les fenêtres en architrave de style Renaissance)

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c) L'Italie du sud

Les châteaux de Naples
Naples fut presque toujours une ville indépendante jusqu'en 1137, date de l'arrivée de Roger le Normand. Le duc de Naples résida donc non dans un château, mais dans un grand palais. À partir du moment où la ville devient capitale d'un immense royaume, les rois durent faire construire tout un système de défense autour de la ville, qui devient "la ville des 7 châteaux", comme Rome est "la ville des 7 collines".

Castel dell'Ovo
le plus ancien monument historique de Naples depuis le Ve siècle où, sur cette petite île s'installèrent des moines. Mais il avait été d'abord le premier lieu de débarquement des Grecs de Cumes au VIIIe siècle av.J.C., et c'est le lieu mythique de Naples, où s'est échouée la sirène Parthénopé qui donne son nom à la ville, et plus tard sainte Patricia, patronne de Naples... et c'est là que selon la légende Virgile plaça dans une cage un œuf magique auquel reste lié le destin de Naples... Mais il fut remplacé au XIVe siècle, ce serait la source des maux de la ville !

Castel Capuano
construit en 1154 par les Normands, mais tellement restauré qu'il ne reste pas grand-chose de sa forme d'origine. Il a été jusqu'à une date récente le palais de justice de la ville.

Castel Sant'Elmo (= St Érasme)
construit en 1329 par Robert d'Anjou sur la colline du Vomero, au-dessus de la chartreuse de San Martino, à la fois pour surveiller les routes qui arrivaient à la ville et pour contrôler l'agitation de la population urbaine. Les Espagnols le transformèrent ensuite dans l'étoile à 6 branches existant encore aujourd'hui.

Castel Nuovo (Maschio Angioino)
réalisé en 1279 par Charles d'Anjou, développé en 1442 par Alphonse d'Aragon ; il est au cœur de l'histoire de Naples avec ses 5 tours, et sa porte principale ornée d'un arc de triomphe célébrant le triomphe des Aragon : un arc de triomphe inférieur entouré de reliefs qui représentent Alphonse d'Aragon entre sa famille et ses capitaines ; sur l'attique, le triomphe d'Alphonse ; et un arc supérieur avec des colonnes ioniques binaires qui devaient contenir la statue du roi, et en haut, 4 statues, des 4 Vertus (Tempérance, Justice, Force et Magnanimité), surmontées de statues de fleuves et de la statue de St Michel (Francesco Laurana, Domenico Gagini, Isaia da Pisa Guillem Sagrera).

Castello del Carmine
de 1382 pour défendre la partie sud-est de la ville, dont il ne reste que 2 tours cylindriques après la démolition de 1906.

Castello di Nisida
(Cf. à droite) : construit au contraire sur une petite île pour protéger l'ouest de la ville, sur les ruines d'une villa de Brutus et d'un manoir angevin : au XVIe siècle, les attaques des Arabes devenaient très redoutables (le corsaire Khayr ad-Din Barberousse (1466-1546) dévaste Ischia et Procida en 1544).

Forte di Vigliena
construit au XVIIIe siècle à l'est de Naples.

Dans la région, beaucoup d'autres châteaux défensifs ou résidentiels, par exemple :

Castello di Sant'Aniceto - Calabre
Château byzantin du XIe siècle au-dessus de Reggio Calabria, un des rares exemplaires conservés de château calabrais, lieu de contrôle des incursions sarrasines et de refuge de la population. Son nom est dû à celui d'un saint sicilien très honoré par les populations siciliennes qui avaient émigré en Calabre et qui participèrent à l'édification du château.

Castello Pandone di Venafro (Molise)
ancienne fortification mégalithique samnite préromaine, transformée par les Longobards (le donjon carré), puis par les Angevins qui ajoutent les trois tours rondes et l'enceinte crénelée ; en 1443, les Aragonais donnent la forteresse à Francesco Pandone, qui la fait décorer de fresques de ses chevaux (Cf. ci-contre à gauche).

Castello di Bosa - Sardaigne - côte ouest)
édifié au XIIIe siècle par la famille toscane de Malaspina, descendants des Obertenghi, au sommet de la colline de Serravalle. Les Malaspina possédèrent la province de Massa, sur la rive toscane, la Sardaigne et une partie de la Ligurie.

Mais un des grands constructeurs de châteaux fut l'empereur Frédéric II (1194-1250), surtout dans le sud de l'Italie.

Frédéric II, roi de Sicile à 4 ans en héritage de sa mère, Constance d'Altavilla, empereur à 22 ans, avait pour but de transformer l'empire, à partir d'une grande vision du monde qui devait le conduire à la paix entre les civilisations juive, chrétienne et musulmane. Un de ses soucis fut la protection militaire de l'empire et donc la construction ou la restauration d'environ 200 châteaux ; selon son décret de 1239, chacun de ses châteaux devait être l'ombre du souverain, de sa magnificence, de sa force, de sa protection.

La Pouille fut sa région préférée (on le disait Puer Apuliae, fils de la Pouille). Parmi les villes qu'il préférait, d'abord Foggia, mais entre tremblements de terre, bombardements et volonté de destruction pontificale, il ne reste pratiquement rien de son splendide château. Mais il construisit des châteaux dans beaucoup d'autres villes des Pouilles :

Castelli de Federico II (1194-1250) :

Castello di Trani - Pouilles, près de Barletta.
Il fut édifié en 1233 sur la base d'une tour du Xe siècle, pour la protection du port et complété en 1249. Manfred, le fils et l'héritier de Frédéric II, y séjourna souvent. Le château passa ensuite sous la domination de la famille d'Anjou qui commença à le modifier, puis sous celle de Charles Quint et des Espagnols qui l'adaptent aux nouvelles armes à poudre. Il devient une prison, est restauré et ouvert au public en 1998

Castello di Bisceglie - Pouilles, près de Barletta.
Château construit à partir de 1060, et repris par Frédéric II, puis refait par les Aragon, transformé et dégradé par des particuliers au XVIIIe siècle, restauré récemment.

Castello di Barletta - Pouilles.
Édifié peu à peu à partir du XIe siècle, développé par Frédéric II à partir de 1228 ; il en fit non seulement une œuvre défensive mais un palais royal pour sa cour. Il fut ensuite modifié par les Angevins et par les Espagnols. On y conserve une statue de Frédéric II (rare, car les papes firent détruire beaucoup d'œuvres pour faire oublier sa mémoire).

Castello di Bari - Pouilles
Fortification médiévale de 1132, construite sur des forteresses romaines par les Normands, détruite par les habitants et reconstruite par Frédéric II en 1233 ; il en reste le donjon et le château, les Aragon ajoutent le mur d'enceinte actuel. Les nouvelles illuminations à partir de 2017 permettent de distinguer les différentes époques de construction, dont beaucoup ont été détruites ; il reste surtout l'enceinte de défense aragonaise entourée de son fossé sur trois côtés (ci-dessous à gauche).

Castello di Brindisi - Pouilles
le château de mer par opposition à l'autre château dit château de terre, pour protéger la vie et le port de Bari. Probablement réalisé sur des restes de forteresse romaine. Bari comme Brindisi étaient les ports de départ du commerce avec l'Orient dès l'Antiquité. Les murailles extérieures sont des XVe et XVIe siècles (voir à droite).

Castello di Lucera - Pouilles
il domine le plateau du Tavoliere des Pouilles sur le Colle Albano, occupé depuis le IIIe millénaire av.J.C. En 1223, Frédéric y concentre les Musulmans de son Royaume, et Lucera devient une ville musulmane, où Frédéric fait construire son Palatium. En 1269, Charles d'Anjou édifie une enceinte de plus de 900 mètres de long, fait assassiner la population musulmane et installe des émigrés provençaux. Une immense citerne alimentait le château en eau potable. Ci-contre à droite une reconstitution et à gauche la Tour de la Lionne.

Castello di Melfi - Basilicata
c'est un des plus importants châteaux médiévaux d'Italie, construit à l'époque normande vers 1043 et très utilisé par les papes (il s'y tient 5 conciles et plusieurs synodes) et agrandi en 1231 par Frédéric II qui y attachait une grande importance. C'est là qu'il écrit l'essentiel de sa réforme des constitutions du Royaume. C'est aussi dans ce château qu'il rencontre son grand amour, Bianca Lancia, d'où naîtra son fils préféré Manfredi. Le château avait une cathédrale détruite par un tremblement de terre en 1851.

Castello di Catania - Sicile
voulu et construit par Frédéric II entre 1239 et 1250, comme base de la défense côtière orientale sicilienne, avec celui de Syracuse. Schéma classique de château en quadrilatère (Cf. ci-contre). Transformé en prison, il comporte des graffitis intéressants de prisonniers.

Castello di Siracusa - Sicile
Construit sur d'importantes forteresses grecques de l'Antiquité, stratégique pour la défense du port. Commencé en 1038 par le commandant byzantin Giorgio Maniace, reconstruit par Frédéric II entre 1232 et 1239 (ci-contre à gauche).

Castello di Caccamo - Sicile, vers Palerme
Construction normande à 513 m. au-dessus du niveau de la mer, à partir d'une tour arabe, au-dessus du bourg médiéval (Photo à droite)

Dans le Centre, Frédéric II ne construisit qu'un château, à Prato, sur la route stratégique entre l'Allemagne et la Sicile :

Castello di Prato -Toscane.
Il fut construit en 1248 sur une forteresse antérieure par Frédéric II dans le cadre de la lutte avec le pape pour la domination de la Toscane ; c'était aussi sur la route entre l'Allemagne et le Sud. Comme pour beaucoup d'autres, c'est le grand architecte de Frédéric qui procéda à son élaboration, Riccardo da Lentini, venu exprès des Pouilles. C'est un édifice classique à plan carré, avec 4 tours d'angle et 4 autres tours dont 2 étaient héritées du précédent édifice. Il fut ensuite transformé en prison, et restauré en 1975.

Mais la principale réalisation de Frédéric II est le château de Castel del Monte, conçu par Frédéric et réalisé aussi par Riccardo da Lentini. Depuis sa construction vers 1240, jusqu'à aujourd'hui, on n'a pas cessé de s'interroger sur sa signification, qui reste un mystère. Il est tout entier bâti sur le chiffre 8, unique dans les Pouilles : 8 côtés, 8 tours octogonales, cour octogonale, 8 salles identiques à chaque étage, la vasque octogonale qui se trouvait probablement dans la cour octogonale ; c'est un des plus anciens symboles de la Rose des vents (et les roses ont souvent 8 pétales), de l'Infini, de l'Incommensurable dans presque toutes les religions (Cf. les 8 pétales du lotus) ; et l'octogone est symbole de résurrection, d'équilibre (la carte VIII des Tarots signifie la Justice), de bonheur parfait, de reconquête du Paradis : voir les 8 Béatitudes de Jésus, la forme octogonale des baptistères... les historiens parlent des années en 8 du XXe siècle, 1948, 1958, 1968, 1978, 1988, 1998 !!. Pour les philosophes grecs pythagoriciens, le carré de 8 (8x8 = 64) était le nombre de la sagesse créative. C'est aussi le symbole du Constructeur, du Souverain, du chef décidé à conquérir pouvoir et autorité, à comprendre la totalité du monde et des lois qui le gouvernent, posséder l'ensemble des savoirs (Frédéric fut un grand scientifique, attaché aux mathématiques, à l'astronomie, une "Stupor Mundi", stupeur du monde, comme on l'appelait...). La semaine n'a que 7 jours parce que le temps continue et n'est donc pas achevé. La mesure moyenne de l'homme au Moyen-Âge était de 8 à 9 empans (plus ou moins 20 cm).

L'autre chiffre significatif est le 3 : la "trifora" de la salle Nord du 1er étage, les 3 fenêtres intérieures, les 3 entrées de la cour, les 3 escaliers en colimaçon, les 3 côtés où il n'y a pas d'écoulement pour l'eau.

Castel del Monte ne semble pas adapté à la défense : pas de fossé, pas d'écuries, pas de cuisines... Alors à quoi ? la dernière hypothèse des architectes de l'Université de Bari est qu'il s'agissait d'une sorte de hammam à l'orientale, autour de la vasque octogonale de la cour, qui a disparu, dont on retrouve aujourd'hui dans les murs les dispositifs de circulation de l'eau. C'était donc à la fois un lieu mystique (dont la structure interne semble souvent inspirée de celle des abbayes cisterciennes) et un lieu de plaisir ordonné selon des symboles numériques et autres.

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4. Enfin, à partir du XVe siècle, les Communes évoluent vers des "seigneuries".

Elles sont caractérisées par le pouvoir d'une seule grande famille, comme les Savoie qui, eux, continuent à régner au Piémont depuis le IXe siècle, et deviendront ducs puis rois au XVIIIe siècle, après avoir déménagé leur capitale de Chambéry à Turin en 1563, et ils collectionneront les grands châteaux comme lieux de chasse ; les Sforza sont maîtres de Milan, les Este de Ferrare, les Gonzague de Mantoue, les Médicis de Florence, les Espagnols dans le Royaume de Naples et en Lombardie, à partir de la défaite de François 1er, et évidemment le pape à Rome, maintenant monarque absolu d'un grand État où il gouverne avec quelques grandes familles nobiliaires, ses vassaux (voir par exemple leurs châteaux des lacs qui environnent Rome).

C'est seulement quand les "communes bourgeoises" se transforment ainsi en "seigneuries" que les villes commencent à se construire leurs châteaux, comme postes de défense tournés contre la ville et permettant d'en maîtriser les révoltes populaires. C'est le cas à Florence, Turin, Milan, L'Aquila. Dans le Sud où la situation reste féodale mais sous le contrôle d'un roi ou d'un empereur, on continue à construire des châteaux.

Castelli dei Savoia - Piémont :

Castello di Moncalieri
contrôlant le passage du Pô depuis le XIe siècle, il est transformé en demeure ducale dans la seconde moitié du XVe siècle ;

Castello di Rivoli
existant depuis le XIe siècle et devenu résidence ducale après 1559, abandonné après la guerre jusqu'en 1979, et restauré en laissant les ruines en l'état, puis devenu Musée d'Art Pauvre.

Castello di Racconigi
devenu résidence royale, puis Musée royal après la déclaration de la République (photo à droite)

Castello di Pollenzo
où s'installe l'Université des Sciences Gastronomiques de Slow Food (photo à gauche) ;

Venaria Reale
bâtie comme résidence de chasse à partir du XVIIe siècle, et intégrant tout le village d'Altesano dans la reconstruction de Filippo Juvarra à partir de 1706 (Cf. à gauche). C'est aujourd'hui un des plus intéressants, avec son grand parc, riche aussi d'œuvres de Pennone, et de ses expositions (Cf. à droite).

Castello Sforzesco - Milan
il est construit au XVe siècle par Francesco Sforza sur les ruines d'une ancienne forteresse des Visconti du XIVe siècle. Il a environ 200 m. de côté, est flanqué de douves (fossés autour du château) et, côté ville (à droite), de deux tours rondes, tandis que du côté campagne d'alors, il avait deux tours carrées qui protégeaient la petite forteresse dans la forteresse, où habitait le duc (au fond à gauche sur l'image). La grande tour côté ville est construite par le Filarète (architecte toscan, 1400-1469) et servait de dépôt de poudre. À partir de 1893, il fut peu à peu transformé en musée d'art ancien, d'archéologie, d'instruments de musique, etc.

Castello Estense de Ferrare - Emilie-Romagne
Il est construit à partir de 1385, et dès l'origine, les bombardes étaient dirigées vers la ville, alors que les Este ne sont vicaires pontificaux que depuis 1372. En 1917-18, le peintre Giorgio De Chirico a représenté le château sur un tableau pour la seconde fois, dans Le Muse inquietanti.

Castello di Mantova - Lombardia
construit à partir de 1395, mais restauré en 1459, résidence d'Isabelle d'Este, femme de Francesco II di Gonzaga, qui réunit les plus grands artistes de son temps, dont Andrea Mantegna qui peint La Camera degli Sposi en 1459 ; il y représente les membres de la famille de Ludovic Gonzague (Cf. photos 1 et 2).

Castello dell'Aquila - Abruzzes
construit en 1532 par les Vice-Rois espagnols pour défendre la ville contre les révoltes de la population (Voir ci-dessus à droite).

Rocca Pia di Tivoli - Latium
construite en tuf volcanique en 1458 par le pape Pie II pour s'assurer l'allégeance des habitants de la ville qui se révoltaient souvent, en hébergeant à Tivoli les troupes fidèles au Saint-Siège. C'est une grande forteresse carrée dotée de 4 tours d'angle ; elle a des murs de 4 m. d'épaisseur, et le pape la dota d'une fabrique d'armes pour mieux assurer son autonomie. C'est là qu'en 1539, le pape Paul III reçut Ignace de Loyola pour la création de la Compagnie de Jésus. En 1522, le pape Adrien VI avait supprimé la municipalité, soumettant définitivement la ville au pouvoir pontifical.

Castel Sant'Angelo de Rome
Ce fut le Mausolée d'Hadrien construit en 125 apr.J.C., transformé en forteresse pour protéger le Vatican lorsque les papes s'y installent au XIVe siècle ; il sert souvent de refuge, à Alexandre VI en 1494 quand Rome est occupée par Charles VIII, et Clément VII y résiste six mois aux lansquenets de Charles Quint en 1527. Depuis Léon IV en 852, il est relié au Vatican par une muraille, et plus tard, en 1277, on construira un couloir secret (le "passetto di borgo") pour que les papes puissent y accéder sans passer par l'extérieur.

Castello di Miramare - Frioul - Trieste
Un dernier exemple de château de résidence, construit en 1856 pour l'archiduc d'Autriche, empereur du Mexique, vice-roi de Lombardie-Vénétie, Maximilien Joseph de Habsbourg, frère de l'empereur d'Autriche, et pour sa femme la princesse Charlotte de Belgique. Le duc Amédée d'Aoste y habita aussi. Il est d'un romantisme néo-médiéval et néogothique. Le parc est une sorte de jardin des merveilles, d'une grande richesse botanique, surtout de plantes non-européennes. Le château est aujourd'hui Musée historique.

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Nous aurions pu voir des centaines d'autres châteaux aussi importants. Vous en trouverez beaucoup d'autres sur Internet (Voir plus loin), mais surtout pensez à les visiter quand vous partez en Italie.

Tout cela n'est qu'une brève introduction à cette grande réalité des châteaux en Italie. Vous pouvez approfondir en consultant par exemple :

Vous pouvez aussi taper le nom italien d'un château précis en ajoutant "wikipedia italiano", les sites wikipedia français n'étant souvent qu'un résumé approximatif du site italien ;

Voyez quelques histoires d'Italie, en particulier :

Cherchez aussi les palais et les villas. Nous publierons d'ici quelques semaines un vocabulaire franco-italien du château.

Jean Guichard (revu le 2 février 2018)

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